PLATEFORME, BILAN ET PROGRAMME DE LA

 

LISTE D'UNION INTERSYNDICALE

 

 

 

/I ‑ ORIENTATIONS ET OBJECTIFS/

 

La situation créée délibérément par le Ministère en annonçant sa décision de transférer l'université de Vincennes sur un terrain de deux hectares a entre autres conséquences. celle de détériorer le climat de l'Université et de provoquer une crise en son sein. Crise subalterne et stérile dans une première phase, quand elle se fixait sur des problèmes ponctuels, traités soit à partir d'informations partielles au partiales et n'engageant qu'un petit nombre d'acteurs dans chaque camp devant une masse d'usagers atterrés. Crise profonde et qui peut être créatrice, dans une seconde phase, à l'occasion des élections universitaires. Profonde parce qu'elle entraîne un débat de fond sur les choix de l'Université. Créatrice parce qu'elle donne l'occasion à tous de s'exprimer dans un débat ouvert, public, sur un terrain commun.

 

Le Conseil sortant, confronté à la dernière minute à une question de mode de scrutin pour son renouvellement, aurait pu arguer de l'ambiguïté des textes, de la jurisprudence, de l'aval des commissions de contrôle électoral pour maintenir les pratiques introduites, avant lui, par l'assemblée constitutive en 1970. Il a préféré, unanimement et avec enthousiasme, adopter le scrutin direct.

Celui‑ci, en effet, fournit l'occasion de ce large débat et permet à ceux qui, depuis les origines, ont refusé (au moins formellement) de participer aux prises de décision, de réviser leur attitude, ce dont nous nous félicitons. Il importe maintenant que ce débat ne soit pas ambigu, en présentant, au nom des candidats syndicaux, une plateforme claire, un programme détaillé, un bilan précis.

 

1. LES OBJECTIFS

 

S'il faut cesser de penser Vincennes avec un regard conservateur, il importe de se souvenir que tant que, par manque de volonté ministérielle, les options de Vincennes n'ont pas été, sinon généralisées, du moins adaptées et adoptées ailleurs, notre Université reste le témoin des objectifs qui lui ont été assignés il y a dix ans et qu'il faut rappeler clairement

 

1) l'Université des salariés

 

A vrai dire, cet objectif est celui qui figure le moins clairement dans les textes constitutifs (rapport E. FAURE à DE GAULLE, 1968) mais qui, dès la première année, est devenu primordial. Vincennes a compris et fait comprendre qu'il n'y avait pas d'ouverture sur le monde contemporain sans ouverture au monde du travail.

 

L'ouverture aux salariés (qu'ils soient bacheliers ou non‑bacheliers, français ou étrangers), étendue aux mères de famille et aux chômeurs est l'option de base de Vincennes, en fonction de laquelle a été pensé le fonctionnement pédagogique :

 

‑ cours le soir et le samedi, ‑ procédure d'accueil pédagogique approfondi, ‑ dialogue étudiants‑enseignants.

 

Encore, pour n'être pas duperie, cette ouverture suppose‑t‑elle deux conditions qu'il nous parait nécessaire de réaffirmer fortement :

 

‑ La pédagogie de Vincennes doit rester différente. Il faut lutter contre les tendances, ici ou là, à réduire les cours du soir et du samedi ; à pratiquer un discours ésotérique qui constitue la plus élitiste des sélections déguisées. Surtout, il faut améliorer l'accueil des nouveaux étudiants, d'abord en réhabilitant le test d'accès des non‑bacheliers, souvent trop formel, et en généralisant le principe d'un accueil pédagogique approfondi par tout étudiant et d'un dialogue possible en permanence avec les enseignants, ce qui suppose de la part de ceux‑ci, un effort de présence supérieur à la pratique des autres universités.

 

‑ Il faut aussi que les salariés et chômeurs admis à ce titre aient une réelle expérience professionnelle. Il ne suffit pas de confondre dans une expression vague "les non‑bacheliers, les salariés et les étrangers". C'est en raison de leur expérience professionnelle réelle que les non‑bacheliers, français au étrangers, sont bienvenus à Vincennes qui se félicite d'en recevoir plus que toute autre université.. Il ne saurait être question de faire de Vincennes l'université ouverte à ceux qui viennent d'échouer au baccalauréat. Ce serait alors un autre projet d'université, pas celui dont nous sommes chargés.

 

2) la spécificité pédagogique

 

On peut rappeler les formes pédagogiques de l'expérience vincennoise

 

     organisation de l'unité de valeur : refus de la division entre cours magistraux, travaux dirigés et travaux pratiques (important à réaffirmer à l'heure où le Ministère tend à réhabiliter cette division par le biais des normes GARACES ou, plus directement, par un renforcement de la hiérarchie entre les enseignants) ; rapports entre enseignants et étudiants permettant à ceux-ci de s'exprimer et, notamment dans leur activité professionnelle, de faire profiter le groupe de leurs expériences vécues ; attachement à la souplesse du fonctionnement en semestres et unités de valeur qui constitue un progrès par rapport à l'ancien système d'études par année et certificats.

 

     introduction de disciplines nouvelles : cette "innovation vincennoise" peut paraître bien timide : sciences de l'éducation, arts, urbanisme, etc... sont généralisés dans les universités étrangères. Vincennes est seulement à l'heure de son temps, nullement en avance. Le refus ministériel de généraliser l'enseignement de ces disciplines, malgré le succès vincennois, n'est pas un des moindres aspects de la politique actuelle de réduction de la place de l'Université dans la nation.

 

L'ouverture vers le monde contemporain : elle se retrouve à travers les options précédentes : accueil des salariés, rapports pédagogiques, disciplines nouvelles. Mais c'est aussi une orientation qui fait qu'une unité de valeur d'une discipline "fondamentale" (langue vivante, histoire, philosophie) est conçue différemment à Vincennes. Le rôle des étudiants salariés et d'étrangers, la présence d'enseignants associés, en apportant, dans l'unité de valeur même, les éléments des problèmes concrets, des interrogations d'autres cultures, est fondamental.

 

3) Maintenir la capacité de dérangement

 

Mais il ne faut pas sombrer dans l'autosatisfaction. Si Vincennes, en 1979, se contente de répéter le modèle mis au point difficultueusement en 1968, sa capacité de dérangement sera bien vite émoussée

 

‑ le renouvellement du corps enseignant est fondamental. On sait combien le blocage des postes et des carrières le rend difficile, et combien sont graves les menaces qui pèsent d'ores et déjà sur toute une série de catégories (assistants, chargés de cours, associés). Si la bataille pour défendre ces catégories est prioritaire, il serait néanmoins souhaitable que soient dégagés les moyens du renouvellement des équipes, sans qu'il soit porté préjudice aux droits légitimes des personnes. Il faut maintenir la possibilité de faire appel à l'apport régulier ou ponctuel de personnes extérieures (associés, chargés de cours état 2).

 

la création de nouvelles formations, non seulement pour profiter des créneaux ouverts par le Ministère (administration économique et sociale, langues étrangères appliquées) mais pour en prospecter d'autres (animation socio‑culturelle, sciences sociales appliquées au travail, etc... ) pour répondre aux besoins de la société d'aujourd'hui et de demain. Sans porter atteinte aux départements existants, des formules souples (distinction du cadre de rattachement et du cadre de service des enseignants) doivent être trouvées pour que de nouveaux enseignements constituent une exploration permanente et un questionnement permanent de la société.

 

L'accueil de nouvelles‑catégories : après les salariés, Vincennes s'est ouverte au chômeurs et aux mères de famille. L'apport a été indiscutable. De même, la formation permanente a élargi les horizons des enseignants qui y participent, comme elle a fait connaître le vrai visage de Vincennes. Demain, une université d'été, dont le projet "troisième âge" actuel doit être l'embryon, devra jouer un rôle analogue.

‑ le langage pédagogique : ne doit pas se scléroser dans une rhétorique théorique et critique. Vincennes doit dépasser la formation des techniciens supérieurs qu'appellent de leurs vœux les entreprises. Mais elle doit amener ses étudiants à être, dans leur vie professionnelle comme dans leur vie de citoyen, efficaces. Sans contenu concret solide, il n'y a pas de véritable formation théorique et critique.

 

2. LES STRUCTURES

 

1) La loi d'orientation universitaire, votée fin 1968 et appliquée en 1970‑1971, a institué des conseils élus (université et U.E.R.) avec participation de toutes les catégories d'enseignants mais aussi des étudiants, des personnels ATOS et de personnalités extérieures. Elle a aussi donné aux universités une autonomie, certes très relative puisque insérée dans la double contrainte des moyens financiers et des profils des diplômes nationaux.

 

La loi d'orientation est actuellement sérieusement remise en cause

 

     par les réformes contraignantes des cycles d'études qui ont tenté, avec un succès réduit jusqu'ici, d'adapter l'enseignement supérieur aux besoins à court terme du marché du travail ;

 

     par la révision systématique des droits des enseignants : aujourd'hui, les plus fragilisées, les assistants et les chargés de cours ravalés avec mépris au rang d'“étudiants qualifiés" ; demain les enseignants titulaires dont la fonction de chercheur sera menacée, pour mieux placer l'Université en position de faiblesse par rapport aux "grands établissements" et à la recherche industrielle ;

 

     par l'application restrictive des procédures de participation (non constitution des CRESER, nominations partisanes du C.C.U. et au CNESER, quorum étudiant dans les conseils, refus de la parité entre corps A et B dans les conseils d'UER., etc ... ) ;

 

     votes "à la sauvette" de dispositions législatives (amendement Foyer sur les transferts de postes, vote par le Parlement de la réforme du 2ème cycle la veille de son annulation prévue pour le Conseil d'État).

 

Le ministère ne se cache pas de vouloir, sinon abroger la loi d'orientation, du moins la vider de son contenu.

 

Il convient de préserver cet acquis, voire de le dépasser.

 

2) Vincennes a déjà largement dépassé la loi d'orientation

 

     dès les origines, les départements ont choisi leurs formes d'organisation. En 1970‑1971, la moitié environ a accepté de constituer des conseils d'U.E.R. Depuis, leur proportion a augmenté, tandis que ces conseils d'U.E.R., là où ils existaient, n'apparaissaient que comme un des cadres d'exercice de la démocratie interne. Chaque département a défini ses propres institutions et leurs rapports réciproques : conseil élu, assemblée des enseignants, bureau délégué par cette assemblée, commissions spécialisées, assemblée générale enseignants‑étudiants‑personnels. Cette diversité des structures de gestion est positive à condition qu'elle associe tous les usagers, en particulier les étudiants, à la préparation et à la mise en oeuvre des choix. Le Conseil d'U.E.R. n'est pas une panacée. Encore moins, la formule du collectif restreint formé de quelques enseignants qui, sans mandat précis, parfois renouvelés chaque année, assurent une gestion au jour le jour et à l'économie sans débat réel ni contrôle affectif.

 

‑ les commissions consultatives, réunissant les représentants de tous les départements (malgré les crises inévitables de leur fonctionnement, un seul département a longtemps refusé d'y participer ; encore est‑il revenu récemment sur cette position) ont permis, lors de la mise en place des structures de la loi d'orientation, d'éviter la coupure de l'Université entre départements "participationnistes" ou "non participationnistes", de faire gérer une moitié de l'Université par l'autre moitié. Aujourd'hui, ce débat de la participation apparaît à tous comme dépassé. Les structures de consultation, de concertation ne le sont pas. Les commissions qui ont créé une structure originale du fonctionnement de Vincennes, relais entre les instances centrales et la base des départements, auront plus que jamais un rôle à jouer à l'heure où les difficultés vont se concrétiser et où les débats vont s'élargir dans les instances délibératives statutaires.

 

‑ le conseil de l'Université n'est pas, selon la loi, un organe de gestion pure, encore moins de mobilisation, mais d"'administration". Il est positif cependant qu'à Vincennes, le Conseil puisse dépasser les attributions limitées qui lui sont confiées par la loi. Sans instituer un parlementarisme inefficace, sans confondre orientation et gestion courante, les statuts de l'Université et la pratique ont donné au Conseil élu, et par là même aux commissions consultatives, un rôle beaucoup plus large. La loi d'orientation d'inspiration nettement présidentialiste, a été dépassée par cette pratique et par la liaison assurée entre le Président et le Conseil.

 

Le conseil a joué un rôle capital à chaque étape des luttes de Vincennes. Mais il n'a jamais prétendu en être l'organe de mobilisation. Il a apporté sa contribution avec les organisations syndicales, les départements, les commissions à une mobilisation qui concerne toute l'Université et dont il a toujours souhaité qu'elle soit le fait de tous. Récemment, ceux qui en étaient toujours absents, semblent en voie de résoudre cette contradiction.

 

3. COMMENT RENDRE CES STRUCTURES ENCORE PLUS DÉMOCRATIQUES

 

Le débat sur la "participation" est dépassé. Celui d'un fonctionnement réellement démocratique de l'Université ne l'est pas. Il importe de préciser clairement nos positions :

 

1) Un fonctionnement démocratique des commissions consultatives

 

Il est vrai que le débat dans certaines commissions s'est sclérosé. Il y a des sujets tabous qu'on évite de traiter. Il y a parfois accord tacite pour ne pas aborder telle question qu'on laisse au Conseil de l'Université le soin de trancher, comme il y a des questions épineuses sur lesquelles on préfère ne pas s'engager : la "mise à l'ordre du jour sans débat" est en fait une fuite devant les responsabilités.


Il est vrai aussi que le déroulement de certaines séances de commissions n'est pas propice à ce que ses avis soient suivis par le Conseil : les commissions doivent éviter de se prononcer sur des questions qui ne sont pas de leur domaine, ou de voter sur une question non inscrite à l'ordre du jour, présentée à la sauvette, souvent de façon unilatérale sous l'influence d'un groupe de pression, voire de la personne directement concernée.

 

Un effort profond doit être fait par tous :

 

     pour assurer une représentation permanente et suivie de tous les départements dans les commissions

 

     pour susciter des débats au sein des départements sur les principaux sujets traités en commission ;

 

     pour donner aux séances de commission, le caractère serein et approfondi qui donne du poids à leur avis.

 

Le Conseil doit tenir le plus grand compte des avis exprimés par les commissions lorsque les décisions ont été prises démocratiquement.

 

On ne le dira jamais trop : la démocratie c'est aussi le fait que chacun assure ses responsabilités. Aucune disposition institutionnelle ne serait remplacer cette disposition d'esprit.

 

2) Les débats au sein des départements

 

Les commissions ne doivent être que l'un des cadres du débat vincennois. Si l'expérience a montré l'inefficacité d'une démocratie à la base (assemblées générales réunissant des minorités et devenues le champ d'exercice du terrorisme verbal), les responsables des départements et les représentants dans les commissions devant etre mandatés et rendre compte de leurs positions.

 

     au niveau de l'information, les documents importants (textes officiels, notes d'information, compte‑rendus des commissions) devraient être affichés pour les usagers, analysés dans les instances du département, ainsi que dans les unités de valeur ;

 

     les structures départementales doivent permettre aux étudiants dûment informés (et non, comme c'est souvent le cas, "désinformés") de participer à des débats réels et approfondis au sein du département dont les positions ne peuvent être fixées par un collectif restreint, voire par l'enseignant le représentant dans une commission ;

 

     les départements doivent adopter des positions claires et publiques : on ne doit pas voir des départements laisser voter une motion en commission puis intervenir auprès des responsables de l'Université pour demander qu'elle ne soit pas appliquée.

 

3) Le rôle des organisations syndicales

 

Il est certain que l'exacerbation des contradictions dues à la crise nationale de l'Université comme le climat politique général freinent la convergence nécessaire des diverses catégories intéressées à la défense de l'Université. Il est certain aussi que le fonctionnement même des instances universitaires a pu conforter l'illusion, relayée par les courants anti‑syndicaux, que l'on pouvait se passer des structures syndicales. Au sein des commissions et des conseils, les débats trop souvent centrés sur des problèmes ponctuels et rarement sur les questions de fond, appauvrissent le fonctionnement démocratique. Le véritable débat démocratique ne peut se faire sans une intense activité syndicale par rapport à tous les problèmes. Le rôle des organisations syndicales est d'élargir, d'approfondir, voire de devancer les débats.

 

Ces trois séries de facteurs expliquent pour une part les difficultés rencontrées dans la gestion d'un conseil élu sur une base syndicale. Le fait que les sections syndicales aient des élus au sein du conseil de l'Université n'est cependant pas contradictoire avec le fait qu'elles doivent garder leur autonomie et développer leurs activités dans le sens de leurs objectifs revendicatifs.

 

Les syndicats ont amplement montré que leur apport était décisif, que ce sait pour la défense des intérêts professionnels de leurs adhérents ou pour la lutte contre la politique du Ministère des Universités, pour la défense de Vincennes.

 

Il dépend donc aujourd'hui de chacun des usagers de l'Université que la prise de conscience de ces problèmes permette de renforcer la vie syndicale et améliorer la vie de l'Université, ses débats et ses actions.

 

L'indépendance et le renforcement de la vie syndicale sont des conditions de la cohérence souhaitable des positions prises par les diverses organisations dans les différents débats de l'Université.

 

4) Présence des enseignants

 

Fonctionnement démocratique des commissions, débats élargis dans les départements, vie syndicale active, information, supposent la présence active de tous dans l'Université. Si les personnels ATOS ont des horaires au des dates de travail, les enseignants ont une organisation plus souple de leurs activités pédagogiques et pédagogico­administratives d'une part, de leurs recherches d'autre part. Mais cette souplesse ne doit pas aboutir pour certains à une présence limitée à leurs cours comme dans les universités traditionnelles. Il serait bon de rappeler qu'à la création de Vincennes, tous les enseignants en poste se sont engagés à être présents, dans les locaux de l'Université, au moins deux jours par semaine.

 

Les élus syndicaux affirment que la présence et la participation active de tous les usagers est indispensable au fonctionnement harmonieux de l'Université, à sa capacité d'atteindre ses objectifs, de maintenir sa faculté d'innovation et sa formation critique, de concilier son unité et ses diversités.

 

4. LES GRANDS DOSSIERS

 

L'Université a‑t‑elle les moyens de sa politique ? La pénurie matérielle, le non‑renouvellement du personnel enseignant, le resserrement progressif du carcan pédagogique, qui lui sont imposés de l'extérieur, permettent‑ils une attitude offensive ?

 


1) Les moyens matériels

 

Après la période de relative aisance (1969‑1970), l'Université a connu la pénurie (1971‑1975) de plus en plus sévère, puis, sciemment organisée par une discrimination avouée à l'égard de Vincennes, l'asphyxie (1976‑1979). Normes GARACES non appliquées, promesses non tenues, crédits retirés à posteriori (heures complémentaires de 1976), refus de prise en compte des personnels de nationalité étrangère, comptabilisation d'l étudiant salarié pour 0,6 étudiant, tous les moyens sont bons au Ministère.

 

Vincennes a fait preuve d'une capacité de réaction non négligeable. La période sombre n'est sans doute pas achevée. Parallèlement à la revendication permanente des moyens auxquels notre Université a droit, à la publicité à faire aux mesures discriminatoires, il conviendra de veiller à la régularité et à la justice des répartitions internes. Sur le plan des heures d'enseignement en particulier, l'effort fait par l'Université en faveur des enseignants à plein temps sans poste (effort unique en France, que les organisations syndicales citent en exemple dans les autres universités), ne doit pas aboutir à l’élimination des chargés de cours extérieurs, ni même empêcher leur renouvellement indispensable.

 

La minceur extrême du budget de la recherche rend difficile les choix et la définition des priorités.

 

Le service de la recherche a toujours essayé

 

     d'associer le plus grand nombre d'enseignants et d'étudiants avancés (maîtrises et doctorats) aux programmes de recherche ;

 

     de consacrer une part très importante du budget (le tiers environ) au secteur publications et communication ; de nombreux colloques ont été organisés, destinés à faire connaître les travaux de Vincennes à l'extérieur et le nombre d'ouvrages, de revues et bulletins publiés dans le cadre du service, ne cesse de s'accroître...

 

Peut-être serait‑il souhaitable d'essayer de dégager plus précisément quelques axes majeurs sur lesquels on concentrerait davantage de moyens.

 

2) Les diplômes

 

Vincennes a fait, résolument, le choix des diplômes nationaux. Ce choix n'était pas évident. Dans un autre contexte, une université expérimentale aurait pu chercher à faire la preuve, en imposant la valeur des diplômes d' université qu'elle délivrait, de la qualité de ses apports innovateurs. Ceci a été rendu impossible par l'attitude ministérielle :

 


     tentative de marginalisation des étudiants salariés non‑bacheliers.;

 

     utilisation des habilitations dans le sens des universités concurrentielles

 

‑ refus d'accorder les moyens (heures d'enseignement, crédits budgétaires) pour les diplômes d'université (sauf à Compiègne et quelques universités protégées) ;     

 

     encouragement aux universités qui introduisent des barrages supplémentaires à l'accès, notamment en ce qui concerne les étudiants titulaires de diplômes de Vincennes.

 

Vincennes, non sans hésitation (1er cycle en particulier) a donc décidé de s'insérer dans le cadre des diplômes nationaux. Sur ce plan, le choix doit être clair. Le Ministère nous a récemment rappelé l'obligation, dans le cadre de l'année de licence, de combiner, conformément aux textes, contrôles continus et examens terminaux (au moins 20 % pour ces derniers, soit l'équivalent de deux unités de valeur dans une licence). La Commission de Pédagogie, par une motion unanime, a défini les conditions dans lesquelles les départements devaient s'engager (dès cette année pour ceux qui sont nouvellement habilités, l'an prochain pour tous) pour introduire des contrôles terminaux qui, au lieu d'être la régression que le Ministère tente de nous imposer, constituent une percée, une nouvelle marque de notre capacité d'innovation, même dans ce domaine. On ne peut donc accepter des formules ambiguës qui, au nom du "rejet des formes de contrôle contraires aux principes de Vincennes" aboutiraient à la renonciation délibérée aux diplômes nationaux. Si c'est bien cela qui est envisagé, il faudrait le dire clairement, publiquement, et soumettre ce choix aux étudiants.

 

Le choix en faveur des diplômes nationaux n'exclut pas, dans les disciplines que le Ministère refuse d'habiliter (à ce jour, notamment informatique, philosophie, cinéma et théâtre) ou dans de nouvelles formations (documentation, psychanalyse, etc. ... ) des diplômes d'université pour lesquels les étudiants doivent bénéficier des mêmes moyens que les autres.

 

3)L'implantation

 

Le principal combat que Vincennes a eu à mener depuis deux ans et aura à mener encore pendant les prochains mois, voire les prochaines années, est celui de son transfert. Après le rejet de Marne‑La‑Vallée en mars 1977, non en raison du site (encore que beaucoup de voix se soient élevées en ce sens) mais en raison du projet de démantèlement (12.000 étudiants, certains départements, les seuls enseignants volontaires), l'Université a fait des contre‑propositions (Bercy et La Villette puis des sites en banlieue est). Celles-ci n'ont même pas été étudiées par le Ministère qui a choisi autoritairement, à Saint‑Denis, un terrain de 2,1 ha, repris à l'Université de Paris‑Nord qui en avait besoin. Sur ce terrain, le Ministère a décidé de construire 24.000 m2 de locaux (contre 33.000 à Vincennes plus le bâtiment militaire), en supprimant tous les services sociaux (restaurant universitaire, crèche, maternelle, sports), en "oubliant" un tiers des départements et des filières, en réduisant de moitié les bureaux administratifs, etc...

 

Face à ce projet, l'Université, à l'automne 1978, a unifié sa position sur une base en trois points :

 

     refus catégorique du projet de Saint‑Denis, véritable démantèlement (on ne se cache pas en privé au Ministère que ce soit le but recherché) ;

 

     mandat aux responsables de l'Université, afin de ne pas laisser le champ libre au Ministère, pour proposer des solutions alternatives conformes aux besoins de l'Université

 

     tant qu'une telle solution n'est pas trouvée, exigence du maintien à Vincennes, c'est‑à‑dire prolongation du bail.

 

Cette position est claire. Elle a été approuvée par toutes les commissions de l'Université, puis par le Conseil. Là encore, il faut exiger que chacun s'y tienne. On ne peut accepter :

 

     ni le discours démagogique condamnant la recherche de solutions alternatives cette recherche a été largement approuvée, y compris par ceux qui la dénoncent ;

 

     ni le discours qui consiste à préparer Saint‑Denis sans le dire. Il faut condamner ceux qui visant à négocier avec le Ministère les conditions du démantèlement à Saint‑Denis (une motion en ce sens a été rejetée récemment par le Conseil de l'Université), sous prétexte de "l'accès aux services d'information émanant de l'Administration" pour pouvoir "réagir à temps et sur les véritables problèmes".

 

La position des élus syndicaux est claire : lutter contre le démantèlement tant qu'il subsiste une chance, même minime, de l'éviter. Lutter contre un projet signifie qu'on n'en négocie pas les modalités d'application.

 

Si cette opération apparaît inévitable, une position claire devra être prise par tous et d'abord par le Conseil de l'Université. Un mandat devra être demandé à ses électeurs. Mais, en février 1979, la priorité est à la lutte contre le démantèlement, une lutte que les élus syndicaux, comme dans le passé, mèneront sans complaisance, et en dénonçant les positions vagues et les formules analogues qui cachent mal résignation et soulagement. Seule une lutte conséquente contre le projet ministériel peut permettre une défense efficace de Vincennes dans toutes les hypothèses.

texte de la liste intersyndicale aux élections de mars 1979

[ne sont pas reproduites ici le bilan de l'activité du conseil, et le détail du programme pour le conseil.]

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